Critique littéraire live
Un de mes premiers moments de gloire — la gloire étant bien relative — en tant qu'écrivain, c'est lorsque j'ai gagné le premier prix du Concours de nouvelles du Cercle d'écriture de l'Université Laval. À ce jour, c'est mon seul prix pour une œuvre de fiction (j'ai quand même eu quelques mentions).
Quelque jour plus tard, j'étais au kiosque du Cercle d'écriture, lors d'une journée de recrutement pour les organismes culturels de l'Université. Il y a un gars qui est venu au kiosque. Je ne le connaissais pas, lui non plus. Il se met à nous parler du concours de nouvelles et à chialer sur le gagnant qui n'aurait jamais dû obtenir le premier prix. J'avais un ami avec moi à la table du Cercle d'écriture et il a voulu intervenir, mais je lui ai fait signe de laisser faire. L'autre a complété son laïus et est reparti.
Depuis, j'ai souvent revu ce comportement. Dans un concours, les autres participants ont tendance à se comparer au gagnant et on est quitte pour un décorticage en règle de toutes les faiblesses. Et, jusqu'à un certain point, la réussite attire cela. On n'a qu'à entendre les commentaires de certains sur les auteurs qui ont réussi (pas que la réussite soit un gage de qualité, mais je ne comprends pas cette attitude assez généralisée qui veut que le succès soit louche).
Cela m'a aussi permis d'apprendre une grande leçon : c'est impossible de faire l'unanimité, ce qui fait qu'il faut savoir vivre avec la critique.
Engueulade par personne interposée
Dans ma jeune vingtaine, j'ai travaillé un an pour les éditions Alire et pour les revues Solaris et Alibis. Cette dernière revue venait de paraître et comme je travaillais en communication-marketing, je devais communiquer avec différents éditeurs qui avaient des collections dans le domaine pour leur offrir d'annoncer dans nos pages. Un éditeur (que je ne nommerai pas) venait justement de lancer une collection dans ce genre (à ma connaissance, ladite collection n'existait déjà pu lorsque j'ai cessé de travailler pour Alire). La directrice de collection m'a appelé pour me dire qu'elle n'était pas intéressée. Mais, en arrière, j'entendais la voix de l'éditeur qui lui criait carrément après : « Dis-leur de manger de la marde les ostis! » et autres « Y veulent mon argent les crisses. » La grande classe. Malgré tout, mon interlocutrice tentait de conserver un ton professionnel et de demeurer polie. Mais j'avais de plus en plus de difficulté à comprendre ce qu'elle disait à cause de l'autre excité en arrière. Finalement, la communication a été rompue. J'imagine que l'éditeur qui se pompait lui-même a fini par raccrocher lui-même.
J'ai ensuite reçu un fax contenant une critique faite dans l'Année de la science-fiction et du fantastique québécois d'un des livres de l'éditeur avec quelques bêtises écrites à la main.
La mort de la mère
Je travaille en ce moment sur Dans ses pas, la novella qui va accompagner la réédition de L'Arracheur de rêves. Et mon directeur littéraire m'en voudrait de ne pas partager la coquille qui s'y est glissée : « Malgré tout, il s'approche pour constater sa mère à elle aussi. » Il fallait bien sûr lire « mort » et non « mère ». Ne vous en faites pas, cela ne devrait pas survivre à la prochaine vague de corrections.
La mémoire, cette faculté qui oublie
Une petite dernière en terminant. En ce moment, je travaille tous les jours sur des séances d'écriture plus petite (entre 30 minutes et deux heures), mais, à mon sens, le vrai travail se fait entre deux séances d'écriture, lorsque je fais le plein d'idées. On dirait qu'il suffit que je cesse d'écrire pour que les idées se bousculent dans ma tête : à propos de ce que j'ai écrit ou de ce qui va suivre. Je prends le tout en note et le mets dans le fichier pour repartir avec ça le lendemain… Eh bien, de plus en plus souvent, je me rends compte que je prends une note que j'avais déjà prise la veille… et que j'avais complètement oubliée depuis. Ou pire encore, que mon idée géniale… est déjà intégrée au texte. Morale de l'histoire : toujours noter mes idées, je ne peux me fier à ma mémoire.
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