J’ai toujours été fasciné par l’œuvre de Lovecrat. Cependant, ce qui m’impressionne le plus, c’est de voir l’influence qu’il a eu sur les auteurs, les cinéastes et les bédéistes qui ont suivi. C’est pas pour rien que j’avais entreprit un doctorat sur l’adaptation cinématographique de son œuvre. Alors quand j’ai entendu parler du roman d’Arnaud Delalande, Le piège de Lovecraft, ma curiosité a immédiatement été piquée. Imaginez, un roman lovecraftien qui se déroule à Québec et même à l’université que j’ai fréquentée lors de mes trop longues études.
C’est l’histoire de David, un étudiant en littérature à l’Université Laval. Après avoir assisté au carnage commis par un de ses camarades, David essaie de comprendre ce qui s’est passé. Cela va l’entraîner sur les traces d’un groupe d’adeptes d’un jeu en ligne mystérieux, le Cercle de Cthulhu. Les membres du groupe sont reconnaissables au tatouage qui se trouve sur leur poignet. Il va aussi se lancer dans une recherche sur les livres maudits, plus particulièrement du Nécronomicon. Il va rencontrer différents spécialistes, jusqu’à Stephen King et même August Derleth. Il va aussi rencontrer d’autres joueurs qui, comme son ami, vont sombrer dans la folie et commettre des crimes violents. Lui-même va commencer à douter de sa santé mentale…
Tout (en fait, 90% du livre) est raconté à la première personne et, dès le début, on sait que le narrateur est maintenant enfermé dans un asile psychiatrique. On peut donc voir ce récit comme le délire d’un schizophrène paranoïaque, ce qui est une lecture qui se tient.
Ce livre est quelque part à mi-chemin entre le roman, l’étude sur Lovecraft et la réflexion sur l'écriture. Comme le personnage est un chercheur et qu’on suit le déroulement de son exploration, on a en quelque sorte une réflexion sur l’œuvre de l’écrivain de Providence. C’est bien fait, bien amené (la plupart du temps) et intéressant à lire. Seulement, cette approche rend d’autant plus condamnable les quelques erreurs qui s’y trouvent, entre autres lorsqu’on parle du recueil Le roi en jaune comme d’un roman de R. W. Campbell (à la page 100 de l’édition Le livre de poche), alors que l’auteur est Robert W. Chambers.
Toutefois, il ne s’agit pas d’un essai, mais bien d’un roman et, à ce titre, Le piège de Lovecraft m’a plu, malgré ses défauts. Le style est alambiqué par moment, un peu comme celui du maître. On est clairement dans le pastiche ici et c’est parfois trop appuyé, malgré plusieurs clins d’œil intéressants. Un peu comme dans le cas de Lovecraft, on se dit souvent que cela ne devrait pas fonctionner, que l’écriture est trop lourde ou trop intellectuelle, pourtant, ça fonctionne. Il y a quelques scènes d’une redoutable efficacité et on se laisse gagner par le mystère.
J’avais hâte de lire un roman lovecraftien qui se passait pour ainsi dire dans ma cour, mais à mon sens c’est le plus grand défaut du livre. Il y a plusieurs erreurs géographiques dans le livre : le chemin Sainte-Foy devient la rue Sainte-Foy, il semble y avoir une confusion entre l’université Laval et l’université de Laval (d'ailleurs, par moment, on a l'impression que Laval est un quartier de Québec puisqu'un des personnages est enfermé au penitencier de Laval) et, pour tout dire, on a l’impression que l’auteur ne connait pas bien la région qu’il décrit. De plus, le personnage principal est souvent trop passif et l’intégration des informations glanées pour sa recherche se fait parfois difficilement. Aussi, j’ai été dérangé par le fait qu’aucun personnage n’a de nom ou de prénom usuel au Québec… même si cela s’explique en partie par la conclusion du livre. Sinon, mon plus gros bémol en ce qui concerne le récit vient du début sous forme d’échange de courriels avec Michel Houellebecq. En toute honnêteté, je ne suis pas convaincu de la pertinence de ce passage qui m’a semblé plus faible.
Cela dit, je suis ressortie de ma lecture avec une impression générale favorable. Cette histoire se termine sur une belle mise en abyme et la vision du Nécronomicon qui est offerte amène à réfléchir (surtout pour les écrivains ou les créateurs).
3 commentaires:
Je suis moi aussi une fan du mythe de Cthulhu et des influences lovecraftienne... mais ce que tu me dis des faiblesses de ce livre ne me surprend pas. Des fois je trouve que les auteurs qui tentent de s'inscrire dans la continuité du mythe forcent trop la note.
Et, à son nom, je dirais que l'auteur est Français, non? Ça pourrait expliquer les erreurs de géographie...
En effet, l'auteur est Français. Mais comme plusieurs Français ont étudié à l'Université Laval, j'espérais que l'auteur soit l'un de ceux-ci. Remarque, c'est peut-être le cas, sauf que les souvenirs se sont étiolés avec le temps...
As-tu déjà demandé des directions à un Français? :p (Pour te donner une idée, quand ils disent "c'est tout droit", faut que tu regardes dans quelle direction ils pointent... et un "carrefour", c'est un genre de centre d'achat et non une intersection... alors les erreurs géographiques ne m'étonnent pas... mais en cette ère où on peut trouver la carte de n'importe quelle ville en deux clics, ça sonne paresse intellectuelle quand même...)
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